En 2021, quels sont les contours de ce grand « Kurdistan » toujours revendiqué par les Kurdes du Moyen-Orient ? Selon les cartes et documents issus des traités signés à la chute de l’empire ottoman à Sèvres (1920) et Lausanne (1923), la terre ancestrale du « Pays des Kurdes » (traduction du mot « Kurdistan ») est toujours rêvée par des millions de Kurdes dans le monde.

Cette terre kurde couvre une superficie d’environ 531 000 kilomètres carrés (dont 41 % en territoire turc), soit l’équivalent de la surface de la France. De souche indo-européenne, la langue de ce peuple a évolué en plusieurs dialectes, les principaux étant le Kurmandji, le Sorani, le Gurani et le Zazaki. Quant à leurs religions, elles sont diverses : si la majorité des kurdes sont des musulmans sunnites, d’autres sont chrétiens, chiites, alévis ou juifs.

Leur recensement est partout « stratégique » et les données chiffrées disponibles sont le plus souvent contestables. En recoupant toutefois certaines sources, leur nombre, en 2020, peut être estimé à 20 millions en Turquie (25% de la population), 12 millions en Iran (15% de la population), 3,5 millions en Syrie (15% de la population) et 8,5 millions en Irak (26% de la population), soit un total de près de 45 millions en comptant les diasporas. En 2020, Istanbul était la plus grande ville kurde du monde, avec 3 millions de Kurdes dont beaucoup sont arrivés dès la fin des années 1980. 

Cette conférence reviendra donc sur cette histoire fragmentée, en m’appuyant sur les nombreux reportages et enquêtes menées par son auteur dans les terres des quatre Kurdistan du Moyen-Orient (Irak, Syrie, Turquie, Iran) entre 2006 et 2020. Au total, une trentaine de voyages et de nombreuses rencontres de responsables kurdes de la diaspora en Europe. Ce travail journalistique au long cours a conduit Olivier Piot à suivre l’actualité de la « question kurde » pendant une quinzaine d’années, en menant des entretiens avec de nombreux experts et universitaires spécialisés, tant au Moyen-Orient qu’en France et en Europe. Un remerciement tout particulier à toutes celles et ceux qui l’ont aidé tout au long de ce parcours sinueux et passionnant.

Ce long travail a donné lieu à de nombreuses publication dans la presse francophone : Géo, Le Monde diplomatique, La Vie, Alternatives internationales, Le Monde des religions, Choc, Sud Ouest, Orient XXI, etc. ainsi qu’à la production d’un web-documentaire en 2009 « Vers un État kurde au Moyen-Orient ? » (Geo.fr) et de deux ouvrages.

Les dates à retenir :

VIe siècle avant J. C. : Les Mèdes installent leur empire sur les rives de la mer noire et en Asie centrale.

Xe - XIIe siècle : prospérité de dynasties et principautés kurdes sous autorité musulmane.

1639 : Le traité de Qars-e-Chirin ou Zuhab trace la première partition du Kurdistan entre les empires perse et ottoman.

1920 : Traite de Sèvres : les Alliés se partagent l’Empire ottoman et promettent la création d’un État kurde.

1923 : Traite de Lausanne : les Alliés rompent leur promesse. Seconde partition du Kurdistan en trois États : Turquie, Syrie et Irak.

1946 : Proclamation de l’éphémère république kurde de Mahamad (Iran). 

1979 : Création du PKK en Turquie et début de la guérilla contre l’État turc (1984).

1988 : Massacre contre une ville kurde (Halabja en Irak) détruite par les armes chimiques de l’aviation de Saddam Hussein.

1991 : Première Guerre du Golfe. La résolution 688 de l’Onu débouche sur l’autonomie kurde au nord de l’Irak (officialisée en 2005).

2011 : Début de la révolution et de la guerre civile en Syrie. Les Kurdes occupent le nord-est du pays.

2013 : Les kurdes syriens proclament la constitution du « Rojava » dans les trois cantons du nord de la Syrie.

2019 : Les États-Unis se retirent de Syrie et les armées turque et russe occupent une grande partie des zones frontalières au nord du pays.

Votre conférenciER

Olivier Piot est journaliste et grand reporter indépendant, spécialiste de l'Afrique et de la question kurde au Moyen-Orient. Après avoir travaillé au journal "Le Monde" et aux magazines Géo" et "Le Parisien Magazine", il crée en 2015 la plateforme (ONG) franco-africaine "Médias & Démocratie" dédiée à la formation de journalistes africains. Il est l'auteur de plusieurs ouvrages, (reportages et essais) et collabore à de nombreux titres de presse en France et à l'étranger.