Contester l’autoritarisme au Maghreb (2011-2021). Retour sur une décen

Contester l’autoritarisme au Maghreb (2011-2021) : Retour sur une décennie de mobilisations

Alors que les « printemps arabes » fêtent leur dixième anniversaire, la Tunisie est souvent considérée comme le seul pays des mondes arabes à avoir amorcé une véritable sortie de l’autoritarisme. Pourtant les peuples de la région aspirent encore à la démocratie et se mobilisent en son nom. Cette conférence sera consacrée aux luttes contre l’autoritarisme dont le Maghreb a été le théâtre durant la dernière décennie. De la révolution tunisienne de 2011, au Hirak en Algérie en 2019, en passant par le mouvement du 20 février (2011), ou du Rif (2016) au Maroc, nous étudierons les temporalités et les espaces dans lesquels se sont déployées ces mobilisations. Nous mènerons une analyse comparée des dynamiques protestataires dans les trois pays du Maghreb central – Algérie, Maroc et Tunisie – en interrogeant les acteurs, les modalités d’action et l’issue des mobilisations. La conférence permettra d’explorer des concepts clés de la politique comparée et de la sociologie politique : révolution, transition, situations révolutionnaires et résilience autoritaire. 

Les dates à retenir :

17 décembre 2010 : immolation de Mohamed Bouaziz, vendeur ambulant, à Sidi Bouzid, en Tunisie.

19 décembre 2010 – 14 janvier 2011 : parti de Sidi Bouzid, le mouvement de contestation prend de l’ampleur et s’étend progressivement à toute la Tunisie.

3 – 10 janvier 2011 : émeutes en Algérie

9 janvier 2011 : appel à une action unitaire du Comité des lycées d’Algérie (CLA), la Ligue des droits de l’Homme (LADDH) et plusieurs syndicats autonomes.

14 janvier 2011 : Zine el-Abidine Ben Ali quitte la Tunisie et s’exile en Arabie Saoudite.

17 janvier 2011 : formation du premier gouvernement provisoire de Mohamed Ghannouchi. La présence de personnalité du parti de Ben Ali, le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), suscite des mobilisations.

21 janvier 2011 : création de la coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD) en Algérie.

27 janvier 2011 : formation du deuxième gouvernement provisoire de Mohamed Ghannouchi.

7 février 2011 : les forces de l’ordre disperse une grande manifestation à Alger.

20 février 2011 : des marches de grande ampleur ont lieu à Casablanca et dans plusieurs autres grandes villes du Maroc.

24 février 2011 : levée de l’état d’urgence instauré depuis 1992.

26 février 2011 : mobilisations contre le gouvernement de Mohamed Ghannouchi. Il y a des morts et des blessées.

27 février 2011 : Béji Caïd Essebsi devient premier ministre en Tunisie.

23 octobre 2011 : scrutin pour l’élection d’une Assemblée constituante en Tunisie.

6 mars 2014 : manifestations à Alger contre un éventuel quatrième mandat d’Abdelaziz Bouteflika.

14 mars 2014 : en Algérie, le mouvement Barakat (ça suffit) appelle à manifester contre le quatrième mandat

17 avril 2014 : Abdelaziz Bouteflika est de nouveau élu président.

20 avril 2014 : des manifestations qui commémorent le printemps berbère sont réprimés par la police.

10 juin 2014 :fondation de la coordination pour les libertés et la transition démocratique (CNLTD) en Algérie.

16 janvier 2016 : mobilisations pour le travail dans plusieurs villes de Tunisie à la suite de la mort par électrocution d’un chômeur à Kasserine.

8 mai 2016 : sit-in de Rifains au Maroc pour la restituions de leurs terres.

30 octobre 2016 : les funérailles de Mohcine Fikri, mort alors qu’il tentait d’empêcher la police de saisir sa cargaison de poisson, se transforme en manifestations.

Mai-juin 2017

Mobilisations au Maroc pour demander la libération de détenus d’opinion du mouvement rifain.

6 juin 2018 : création du mouvement Mouwatana (citoyenneté) en Algérie.

13-21 février 2019 : des manifestations ont lieu dans plusieurs villes d’Algérie à la suite de l’annonce de la candidature d’Abedelaziz Bouteflika à un cinquième mandat lors des élections initialement prévues le 18 avril 2019.

22 février 2019 : premier vendredi de mobilisation nationale du Hirak algérien. Le mouvement continuera durant 53 semaines. Des manifestations, notamment étudiantes, se tiendront le mardi à partir de cette date.

11 mars 2019 : report de l’élection présidentielle sine die ; le président Bouteflika renonce à être candidat aux prochaines élections présidentielles.

3 avril 2019 : démission d’Abedelaziz Bouteflika. Bien que le gouvernement intérimaire soit assuré par un civil, Ahmed Gaïd Salah, chef de l’état-major de l’armée occupe le devant de la scène politique.

12 décembre 2019 : élection du nouveau président algérien Abdlmadjid Tebboune lors d’un scrutin controversé.

13 mars 2020 : interruption des marches en Algérie, en raison de la crise sanitaire de la Covid.

18 juin 2021 : alors que la Tunisie fête le dixième anniversaire du départ de Ben Ali, dans une atmosphère étouffée par le couvre-feu, des émeutes ont lieu dans plusieurs villes du pays. Plus de 600 personnes sont arrêtées.

Votre conférencière

Farida Souiah est docteure en science politique (Sciences Po Paris) et chercheuse associée à l’Institut de recherche et d’études Méditerranée Moyen-Orient (Iremmo) ainsi qu’au LAMES (CNRS, Aix-Marseille Université). Spécialiste du Maghreb, ses travaux de recherche portent sur les migrations, les politiques migratoires, et les mouvements sociaux.

À lire pour aller plus loin :

Allal Amin et Pierret Thomas (eds.), 2013, Au cœur des révoltes arabes : devenir révolutionnaires, Paris, Armand Colin (coll. « Recherches »).

Bennani-Chraïbi Mounia et Fillieule Olivier, 2012, « Retour sur les situations révolutionnaires arabes », Revue française de science politique, 2012, vol. 62, no 5‑6, p. 767-796.

Bennani-Chraïbi Mounia, 2019, « Rétrospective sur la voix de la rue au Maroc : Tout ne change pas pour ne rien changer », L’Année du Maghreb, 2019, no 21, p. 37-54.

Dakhli Leyla (ed.), 2020, L’Esprit de la révolte : Archives et actualité des révolutions arabes, Paris, Seuil.

Hmed Choukri et Jeanpierre Laurent (eds.), 2016, « Révolutions et crises politiques au Maghreb et au Machrek », Actes de la recherche en sciences sociales, 2016, vol. 211‑212, no 1-2, p. 128.

Martinez Luis, 2019, L’Afrique du Nord après les révoltes arabes, Paris, Presses de Sciences Po.