Le soir d’Eylau, ce 8 février 1807, Larrey contemple depuis son infirmerie, l’invraisemblable hécatombe de ce champ de bataille gelé. Pendant toute la durée des combats, ses ambulances volantes ont récupéré les blessés pour les conduire sur sa table d’opération. Opérer le plus vite possible pour empêcher l’infection et la gangrène, telle est sa devise : il effectue plus de 200 amputations jusqu’à tard dans la nuit. Le lendemain on compte environ 10 000 soldats français morts au combat.

Larrey a accompagné l’empereur pendant toutes ses campagnes, depuis l’Italie jusqu’à Waterloo en passant par l’Égypte et l’Espagne. D’un courage exceptionnel, il opère les blessés sous la mitraille et Napoléon dit de lui qu’il vaut une division tant les soldats l’aiment et ont confiance en ses soins.

Ce pionnier de l’urgence chirurgicale est aussi un humanitaire dans l’âme car il soigne également les soldats ennemis. Et après la chute de l’empire, il cherche à créer avec l’anglais Sidney Smith une organisation internationale pour soigner tous les blessés de guerre, préfiguration de la Croix Rouge, 50 ans plus tard.

Dans le Mémorial de Sainte Hélène (tome 2, chapitre 16), l ’Empereur a fait un vif éloge de Larrey. « C’est le plus honnête homme que j’aie rencontré, un constant et héroïque ami du soldat ; vigilant, toujours sur pied, toujours soignant les blessés, les visitant, les consolant. J’ai vu Larrey sur le champ de bataille, suivi de ses jeunes chirurgiens, chercher sans relâche un signe d’animation dans les corps étendus sur la terre. Larrey bravait tout : les froids, les pluies, les soleils. Il ne dormait jamais après le combat au milieu des plaintes des blessés. Avec lui, les généraux ne pouvaient pas abandonner leurs malades. Il fallait qu’ils lui fissent remettre exactement les fournitures que réclamait l’entretien des ambulances. Sans cela, cet homme, que nombre d’officiers supérieurs redoutaient, serait venu à moi se plaindre, et en leur présence. Il ne faisait la cour à personne ; il haïssait les fournisseurs. »

Larrey et son collègue Percy ont leurs noms gravés sur l’Arc de triomphe de l’Etoile à Paris.

Les dates à retenir :

8 juillet 1766 : Naissance de Dominique-Jean Larrey à Beaudéan (Hautes Pyrénées).

1779 : Larrey devenu orphelin est élevé à Toulouse par son oncle Alexis Larrey Chirurgien à l’hôpital de la Grave.

1785 : Larrey de rend à pied à Paris pour suivre les cours de Pierre Joseph Desault à l’hôtel Dieu.

1787 : Larrey commence sa carrière comme chirurgien de la marine sur le Vigilante.

1788 : Il rencontre Corvisart et Bichat.

1792 : Chirurgien aide major de l’armée du Rhin.

1793 : (13 ventose an II) il épouse Marie Elisabeth Laville-Leroux, peintre.

1796 : chirurgien inspecteur de l’armée d’Italie puis chirurgien chef de l’armée d’Egypte.

1802 : Chirurgien chef de la garde des consuls.

1803 : These de médecine sur les amputations.

1804 : Légion d’honneur.

1805 : chirurgien chef de la Garde impériale.

1812 : Chirurgien chef de la grande armée.

1811 : Mastectomie de Fanny Burney auteur anglaise (Du consulat à Waterloo, Souvenirs d’une anglaise à Paris et à Bruxelles).

1812 : Publication de ses mémoires et de la relation historique de l’armée d’Orient.

1820 : Membre de l’académie royale de médecine.

25 juillet 1842 : Mort de Larrey à Lyon.

1850 : Statue de Larrey au Val de Grace.

Votre conférenciER

Le Pr Jean-Noël Fabiani est directeur de l’enseignement de l’histoire de la médecine à la Faculté Paris Descartes.