SANDRO BOTTICELLI (1445-1510), BEAUTÉ ET PHILOSOPHIE

SANDRO BOTTICELLI (1445-1510), BEAUTÉ ET PHILOSOPHIE

Florence est le principal foyer de la Renaissance. Durant plus de deux siècles, entre le début du XIVe siècle et le début du XVIe siècle, la ville connaît un essor artistique exceptionnel soutenu tout à la fois par un commerce florissant, d’importants ordres religieux et un riche mécénat privé. Au milieu du XVIe siècle, l’artiste et écrivain Giorgio Vasari (1511-1574) contribue au prestige de la ville en écrivant Les Vies des plus excellents peintres, sculpteurs et architectes (1550-1568), ouvrage qui contribue à ancrer dans les mentalités la suprématie artistique de Florence et de la Toscane. Sandro Botticelli est sans doute l’artiste le plus atypique du foyer florentin et plus généralement de la Renaissance italienne. A une époque qui consacre l’étude de la nature et de la perspective objective, il préfère explorer la profondeur des sentiments. Mais, malgré l’apparente inquiétude qui anime ses figures, son style ne cesse pas d’en affirmer la beauté. Dans une étude fondamentale consacrée à Botticelli et publiée en 1893, l’historien de l’art allemand Aby Warburg (1866-1929) signale que « pour tout objet aux contours précis, Sandro Botticelli a le regard attentif du « peintre-orfèvre florentin ». Quatre siècles auparavant, dans une déclaration critique, Léonard de Vinci s’exclamait : « Notre Botticelli disait de la nature que c’était une étude vaine, car il suffisait de jeter une éponge imbibée de diverses couleurs sur un mur pour qu’elle y laisse une tache où l’on pouvait voir un beau paysage ». En fait, son centre d’intérêt fut de peindre la psychologie humaine. On note que la nonchalance, voire la tristesse des figures du maître est remarquable. Les personnages de Botticelli semblent mélancoliques. Seuls les anges du Pérugin (1448-1523) possédaient à ce degré cette subtile intensité intérieure. Paradoxalement, le sentiment de mélancolie, tel que cherche à l’évoquer le peintre, est défini dans le système philosophique de Marcile Ficin (1433-1499) extrait du De Vita : « L’homme c’est l’âme et l’âme est immortelle ». Mais, le malheur vient de ce que cette âme est tombée dans le temps, et qu’elle est unie dans un corps. D’où la naissance de la mélancolie. Facile Botticelli ? Disons merveilleusement profond ! Fiévreusement beau !

Les dates à retenir :

1445 : naissance à Florence le 1er mars.

v.1461-1462 : début de son apprentissage auprès de Fra Filippo Lippi.

1472 : rejoint la Compagnia di San Luca, la confrérie des artistes de Florence.

1474 : appelé à Pise pour peindre un cycle de fresques dans le Camposanto Monumentale.

1481 : appelé par le pape sur le chantier de la Chapelle Sixtine à Rome.

1482 : retour à Florence, chargé de décorer la Sala dei Gigli du Palazzo Vecchio avec certains des artistes les plus reconnus de l'époque, tels que Domenico Ghirlandaio, Le Pérugin et Piero Pollaiuolo.

1483 : participe au programme décoratif le plus ambitieux initié par Laurent le Magnifique, la décoration de la villa di Spedaletto, près de Volterra, où il réunit les meilleurs artistes de la scène florentine de l'époque.

1493 : son frère Giovanni meurt.

1495 : réalisation des travaux pour les Médicis de la branche « Popolano », peignant pour eux des œuvres destinées à la Villa del Trebbio.

1504 : il fait partie des membres de la commission chargée de choisir le lieu le plus approprié pour installer le David de Michel-Ange.

1510 : décès le 17 mai à Florence.

Votre conférencier

Docteur en Histoire de l’Art moderne de l’université Michel de Montaigne (Bordeaux 3), chercheur associé Criham-Unilim, enseignant en classes préparatoires, Christophe Levadoux est spécialiste de l’Histoire de l’Architecture et des arts décoratifs français au XVIIIe siècle, à travers notamment le mécénat artistique des princes de Bourbon-Condé. Auteur de nombreux articles scientifiques liés à son sujet de spécialité et au patrimoine auvergnat, sa thèse Louis-Henri de Bourbon (1692-1740), prince des Lumières doit être publiée prochainement en deux volumes (vol 1. Les bâtiments ; vol.2. Les objets d’art). Conférencier reconnu en région Rhône-Alpes-Auvergne, son esprit résolument progressiste et iconoclaste le pousse à vulgariser l’Histoire de l’Art auprès d’un public avide de ses présentations érudites et décalées. Sa devise ? « Le courage a le mérite que l’on se doit pour exister » Sonia Lahsaini.

À lire pour aller plus loin :

Paul Barolsky, Ovid and the metamorphoses of modern art from Botticelli to Picasso, New Haven London, Yale University Press,2014.

Cristina Acidini Luchinat, Botticelli : Les allégories mythologiques, Paris, Gallimard, 2001.

Giulio Carlo Argan, (1909-1992), Botticelli, Skira, 1989.