L’ARCHITECTURE DE LA MOSQUÉE : DES ORIGINES AUX OTTOMANS

L’ARCHITECTURE DE LA MOSQUÉE : DES ORIGINES AUX OTTOMANS  

La mosquée, « lieu du prosternement », est par excellence l’édifice dans lequel l’islam va s’exprimer, des origines à nos jours. D’où vient la forme architecturale de la mosquée ? Quels en sont les programmes iconographiques et décoratifs ? Tout d’abord, cette présentation reviendra sur l’origine de la mosquée, à savoir la maison du prophète Muhammad. C’est en effet dans sa propre demeure à Yathrib, alors qu’il est en exil, que Muhammad enseigne la révélation qu’il a reçue à ses premiers disciples. Les premières mosquées, lieux désormais exclusivement dédiés à la prière, reprennent le plan à cour de la maison du prophète. Si le décor évolue au cours du temps, il est d’emblée dépourvu de toute figuration. La mosquée de Damas en Syrie offre un premier exemple remarquable de cet art de l’Islam alors naissant, inspiré notamment des mosaïques byzantines. Lorsque que le pouvoir se déplace vers l’est, et plus précisément en Mésopotamie, sous les Abbassides, le décor et les techniques de constructions reflètent les influences orientales : décors inspirés des motifs perses sassanides et usage de la brique. Cette architecture, qui évolue au fil du temps, témoigne également de la variété des formes locales, au sein d’un monde musulman qui s’étend des rives de l’océan Atlantique à celles de l’océan Indien. La mosquée de Cordoue, construite entre 785 et 987, témoigne ainsi des influences orientales rapportées de Syrie par les Omeyyades d’Al-Andalus, auxquelles se mêlent des emprunts faits à l’architecture romaine et à l’architecture wisigothique. En Iran, la dynastie turque des Seldjoukides va initier un nouveau plan de mosquée caractérisé par une cour à quatre iwâns, espace voûté largement ouvert en façade et typique de l’architecture perse. La Mosquée du Vendredi, à Ispahan (Iran), illustrera cette innovation architecturale. Plus à l’est, en Transoxiane, la dynastie Timouride (1370-1507) va marquer le paysage avec ses mosquées aux toits bleu turquoise. L’exemple de la mosquée Bibi Khanum à Samarcande, érigée sous le règne de Tamerlan, illustre la volonté de celui qui se désigne comme le « Maître du Monde » de marquer sa capitale du sceau de la grandeur. Enfin, à l’époque ottomane, Soliman le Magnifique a voulu exprimer sa filiation avec l’empire byzantin en commanditant au grand architecte Sinân la mosquée Suleymanié, dont l’architecture du dôme reprend celle de la basilique Sainte-Sophie.

Les dates à retenir :

622 : « hégire » (migration) de Muhammad à Yathrib, la future Médine (Arabie saoudite).

661-750 : Califat omeyyade.

706 : Grande Mosquée de Damas (Syrie), ou « Mosquée des Omeyyades ».

750-1258 : Califat Abbasside.

785 : début de la construction de la Grande Mosquée de Cordoue (Espagne).

848 : Grande Mosquée de Samarra (Irak).

1038-1157 : Les Seldjoukides règnent sur l’Iran.

1399 : mosquée Bibi Khanum à Samarcande (Ouzbékistan).

1453 : prise de Constantinople par les Ottomans.

1550 : Construction de la mosquée Suleymanié (Istanbul, Turquie) par l’architecte Sinân.

Votre conférencière

Sterenn Le Maguer-Gillon est archéologue et historienne de l’art spécialiste de l’Islam médiéval. Elle a encadré des fouilles archéologiques en péninsule Arabique et en Ouzbékistan. Elle a enseigné l’histoire de l’art et l’archéologie islamique à l’Université Paris 1. Depuis 2020, elle enseigne à l’Institut Catholique de Paris un cours sur les « Arts, histoire et culture du monde arabo-perse » et un cours d’histoire de l’art intitulé « Pluralités des aires culturelles » à l’Université Rennes 2.

À lire pour aller plus loin :

Sheila Blair, The Art and Architecture of Islam, 1250-1800, New Haven/Londres : Yale University Press, 1994.

Richard Ettinghausen, The Art and Architecture of Islam, 650-1250, Harmondsworth : Penguin Books, 1987.

Hillenbrand Robert, Islamic Architecture, Edimbourg, 1994.

STIERLIN Henri, L’architecture de l’Islam. Au service de la foi et du pouvoir, Paris : Découvertes Gallimard, 2003.