Une promenade architecturale à Saint-Pétersbourg

UNE PROMENADE ARCHITECTURALE A SAINT-PETERSBOURG

En 1703, le tsar Pierre le Grand (r. 1682-1725) fonda la ville de Saint-Pétersbourg sur les bords du golfe de Finlande, dans une région gagnée par la Russie sur le royaume de Suède. Quelques années plus tard, la cité devint la capitale (1712) ouvrant une nouvelle ère dans l’histoire de la Russie. Parallèlement, dès sa naissance Saint-Pétersbourg fut une extraordinaire machine à mythes alimentée par l’incroyable défis lancé par Pierre le Grand : bâtir une métropole moderne sur un espace marécageux constitué d’une quarantaine d’îles posées à l’embouchure d’un fleuve - la Néva - et baignées par la mer Baltique. Mais il y avait aussi la volonté de ne plus cantonner la Russie à son centre (Moscou), de se détourner de la steppe asiatique pour regarder vers l’Europe, c’est-à-dire vers la modernité et élever la Russie au statut d’un « nouvel empire universel ». Rapidement, une ville « improbable » sortit de la tourbe, animée par la régularité, striée de palais baroques, de façades colorées et stuquées, de canaux navigables, de quais de granit brun et de grandes avenues. Il en résulta une capitale ordonnée et rationnelle, qui ne cessa d’être enrichie et raffinée au gré du passage du temps, des règnes. Mais au XIXe siècle, le romantisme fit sauter ce vernis, substituant à la vision solaire de Saint-Pétersbourg l’image d’une ville née dans la douleur et la cruauté, et du sacrifice de milliers d’hommes pour le seul plaisir d’un tsar inconséquent ! L’historien russe Karamzine parlera de l’« erreur brillante de Pierre le Grand »… Car derrière la beauté des façades, il existait bien un monde fait d’arrière-cours pouilleuses et de misérables, et aussi cette crainte partagée par tous les habitants de l’engloutissement programmé de la cité sous les flots, il est vrai qu’en 1824 la ville avait connu sa plus terrible inondation. De Pouchkine à Dostoïevski en passant par Nicolas Gogol, du drame à la satire, Saint-Pétersbourg apparut dès lors comme la ville du mal-être, une cité faite de bric-à-brac et d’emprunts étrangers mal digérés. Une ville habitée par le fantastique et les sortilèges et dans laquelle des vies ordinaires pouvaient être bouleversées par des situations extraordinaires comme dans les récits de Dostoïevski. A ce titre, elle s’opposait à sa concurrente Moscou considérée comme le conservatoire d’une authentique culture russe. Comme le résuma Gogol, pour exister, « la Russie a besoin de Moscou mais Saint-Pétersbourg a besoin de la Russie » ! En 1918, à l’issue de la révolution d’Octobre, Moscou redevint la capitale de la Russie. Renommée Léningrad (1924), la « Palmyre du nord » passa alors au second plan : la période soviétique ne lui apporta rien mais n’osa rien détruire non plus. En 2003, redevenue Saint-Pétersbourg, la ville sortit de sa longue léthargie pour célébrer avec fastes le bicentenaire de sa fondation sous l’œil attentif de l’enfant du pays, Vladimir Poutine.

Les dates à retenir :

1703 : fondation de la citadelle Pierre-et-Paul de Saint-Pétersbourg par Pierre le Grand (1662-1725).

1712-1713 : transfert de la cour de Moscou à Saint-Pétersbourg, nouvelle capitale de la Russie.

1754 : Élisabeth de Russie demande à l’architecte Bartolomeo Rastrelli de reconstruire le Palais d’Hiver (l’Ermitage). Diffusion du style baroque élisabéthain à Saint-Pétersbourg.

1762-1796 : règne de Catherine II de Russie et diffusion du style néo-classique à Saint-Pétersbourg.

1825 : révolte des Décembristes sur la place du Sénat.

1917 : octobre, prise du Palais d’Hiver par les bolchéviques. L’année suivante Moscou redevient la capitale de la Russie.

1924 : Saint-Pétersbourg, rebaptisée Petrograd en 1915, devient Leningrad.

1941-1944 : siège de Léningrad par la Wehrmacht (1,8 million de victimes).

1991 : à l’issue d’un référendum, la ville reprend son nom original : Saint-Pétersbourg.

2003 : célébration du tricentenaire de la fondation de Saint-Pétersbourg.

JEUDI 22 JUILLET a 10h

Votre conférencier

Diplômé de l’Ecole du Louvre et de l’université Paris-IV-Sorbonne, Fabrice Delbarre est Guide conférencier-national.

À lire pour aller plus loin :

Grigori Sternine, Elena Kirillina, Ilya Répine, Parkstone International (2019).

Sternine, Grigori, Ilia Répine, Leningrad Aurora 1985.

Collectif, Exposition Ilya Repin: Russia's Secret, Waanders, Groningen, 2005.

Collectif, « L’art russe dans la seconde moitié du XIXe siècle : en quête d’identité », Musée d’Orsay, RMN, 2005.


À REGARDER pour aller plus loin :

You tube, une frise de 479 oeuvres de Répine.