LE NATIONALISME ÉCOSSAIS : EN ROUTE VERS L’INDÉPENDANCE DE L’ÉCOSSE ?

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LE NATIONALISME ÉCOSSAIS : EN ROUTE VERS L’INDÉPENDANCE DE L’ÉCOSSE ?

En battant l’armée anglaise du roi anglais Édouard II, lors de la bataille de Bannockburn du 24 juin 1314, le roi écossais Robert I, également appelé Robert Bruce, préserva les frontières de son pays. La souveraineté de l’Écosse fut proclamée quelques années plus tard dans la déclaration d’Arbroath du 6 avril 1320, signée par cinquante-et-un nobles écossais qui affirmaient alors leur allégeance à Robert Bruce. La déclaration fut envoyée au Pape Jean XXII, à qui les nobles écossais demandaient de contraindre Édouard II de cesser ses tentatives d’invasion de l’Écosse. Huit ans plus tard, à la faveur de la chute du roi anglais, l’Angleterre signait un traité de paix avec sa voisine du nord, reconnaissant alors Robert Bruce comme le souverain légitime d’Écosse.

L’Écosse conserva sa souveraineté pendant presque quatre cent ans, jusqu’à l’acte d’Union de 1707 qui réalisa l’union des parlements écossais et anglais en un seul parlement, à Westminster, sous l’autorité d’un roi protestant et fonda le Royaume-Uni de Grande-Bretagne. L’Écosse devenait alors une nation sans État. L’union avec l’Angleterre fut volontaire et n’a ensuite pas suscité de remise en cause sérieuse pendant plus de deux siècles. Aujourd’hui, de nombreuses voix en Écosse appellent sans ambiguïté au retour à un État souverain, complètement indépendant des autres nations britanniques, tel qu’il était avant l’union des parlements écossais et anglais de 1707.

Depuis plus de 50 ans et le premier véritable succès électoral du parti national écossais (Scottish National Party – SNP), à la législative partielle de 1967 à Hamilton, le débat entre l’autonomie ou l’indépendance écossaise s’est installé comme une question majeure dans le paysage politique britannique. Jusqu’à présent, les forces unionistes l’ont toujours emporté, en concédant davantage d’autonomie à l’Écosse au sein du Royaume-Uni. Le référendum pour l’indépendance de l’Écosse de 2014 s’est ainsi soldé par une victoire sans appel du non, à 55%. Cependant, la sortie officielle du Royaume-Uni de l’Union européenne le 1er janvier 2021 a relancé les tensions institutionnelles entre l’Écosse et le reste du Royaume-Uni, ainsi que l’exigence d’organiser un nouveau référendum d’auto-détermination. Cette conférence propose donc un éclairage sur la question de l’indépendance écossaise, en revenant sur la nature et la trajectoire du nationalisme politique écossais ainsi que sur le contexte institutionnel et politique complexe qui régit les relations entre l’Écosse et le reste du Royaume-Uni.

Les dates à retenir :

6 avril 1320 : Déclaration d’Arbroath.

1603 : Union des couronnes. Jacques VI Stuart, roi d’Écosse devient également Jacques 1er roi d’Angleterre, à la mort de sa cousine la reine Elisabeth 1ère, qui disparaît célibataire et sans descendance. L’Angleterre et l’Écosse restent deux royaumes distincts et indépendants.

1707 : Union des parlements écossais et anglais. Création du Royaume-Uni de Grande-Bretagne.

1934 : Création du Parti national écossais (Scottish National Party – SNP).

1967 : Première victoire électorale significative du SNP à la législative partielle de Hamilton.

1er mars 1979 : Référendum pour la dévolution des pouvoirs à un parlement écossais. Le oui l’emporte à 52% mais représente moins de 40% de l’électorat. Le résultat n’est donc pas validé.

11 septembre 1997 : Second référendum pour la dévolution des pouvoirs à un parlement écossais. Le oui l’emporte à 74,3%, avec une participation de 60,4%.

1998 : Le Scotland Act 1998 rétablit le parlement écossais.

1er juillet 1999 : Réouverture du parlement écossais.

2007 : Victoire du SNP aux élections législatives écossaises.

2011 : Le SNP obtient la majorité au parlement écossais.

2012 : Le Scotland Act 2012 étend les pouvoirs du parlement écossais une première fois.

28 septembre 2014 : Premier référendum d’auto-détermination pour l’indépendance de l’Écosse. Le non l’emporte à 55%.

2016 : Le Scotland Act 2016 étend les pouvoirs du parlement écossais une seconde fois, dans le domaine fiscal en particulier.

23 juin 2016 : Référendum du Brexit. En Écosse, 62% des électeurs votent contre. Le débat pour un second référendum d’indépendance est relancé.

1er janvier 2021 : Le Royaume-Uni sort définitivement de l’Union européenne, après une courte période de transition d’un an.

6 mai 2021 : le SNP gagne les élections législatives écossaises pour la quatrième fois d’affilée et forme un gouvernement minoritaire. Il obtient le soutien du parti des Verts, également en faveur de l’indépendance de l’Écosse.

Votre conférencier

Fabien Jeannier est docteur en civilisation britannique de l’université de Lyon, chercheur associé au laboratoire ICTT, à Avignon Université. Ses recherches portent principalement sur l’Écosse contemporaine.

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À lire pour aller plus loin :

Edwige Camp-Pietrain, L’Écosse et la tentation de l’indépendance, Villeneuve d’Ascq, Presses universitaires du Septentrion, 2014.

Edwige Camp-Pietrain, « Une Écosse en marge du Royaume-Uni ? », Outre-Terre, n°49, 2017, p. 139-153.

Keith Dixon, « Le pari risqué des nationalistes écossais : l’indépendance ou rien ? », Politique étrangère, 2013/4 (Hiver), p. 51-61.

Nathalie Duclos, L’Écosse en quête d’indépendance ? Le référendum de 2014, Paris, Presses de l’Université de Paris-Sorbonne, 2014.

Fabien Jeannier, « Les enjeux du référendum sur l’autodétermination du 18 septembre 2014, vus depuis l'Écosse », Géoconfluences, septembre 2014.

Fabien Jeannier, « Les incertitudes écossaises, entre autonomie et indépendance », dans François Dubet (dir.), Politiques des frontières, Paris, La Découverte, 2018, p. 50-70.