La bataille des longitudes : 300 ans de lutte technologique pour maîtr

LA BATAILLE DES LONGITUDES : 300 ANS DE LUTTE TECHNIQUES POUR MAîTRISER LA MESURE DU TEMPS

Donnez-moi l’heure et je vous dirai où vous êtes ! Du Siècle des Lumières aux siècles des étoiles, de l’exploration des océans à la conquête spatiale, pour répondre à la question « où suis-je ? », il faut d’abord demander : « Quelle heure est-il ? ». Dès lors, les scientifiques se sont appliqués à développer les outils de mesure du temps à la pointe la plus extrême de la technologie de leur époque.

1707 : quatre navires anglais de la flotte de Méditerranée, qui a gagné définitivement Gibraltar à l’Angleterre, se fracassent sur les îles Sorlingues à l’entrée de la Manche. 1 550 hommes disparaissent, dont l’amiral. Le désastre est attribué à une erreur de longitude, alors impossible à calculer précisément.

1714 : le parlement britannique promulgue le Longitude Act. Il promet une énorme récompense à qui pourra créer un chronomètre de marine fiable en mer. La bataille des longitudes a commencé. L’Angleterre et la France se lancent dans une lutte technologique acharnée pour déterminer avec précision la position d’un navire en mer. Donc dessiner les cartes. Donc conquérir le monde. Les rois de France et d’Angleterre s’emparent personnellement de ce défi. Leurs armes : les montres marines. Leurs champions : deux horlogers qui ont dessiné le monde : John Harrison, autodidacte passionné, et Ferdinand Berthoud, ingénieur et horloger du roi. Objectif : une précision d’un décalage maximum d’1 minute par an en mer. Par son ampleur, par ses enjeux géopolitiques et technologiques, pour l’exploration des immenses espaces de l’océan Pacifique alors inconnu, par ses coûts faramineux, cette aventure ne peut se comparer qu’à la conquête de l’espace au XXème siècle.

En 2022, le CNES doit envoyer Pharao, une horloge atomique de nouvelle génération, vers la Station Spatiale Internationale. Sa mission : affiner la précision de la mesure du temps dans l’espace pour augmenter la fiabilité des systèmes de positionnement par satellite GPS et Galileo. Objectif : un décalage maximum de 10-11 seconde par jour, soit 1 seconde tous les 300 millions d’années.

Cette conférence va vous raconter la fabuleuse aventure de 300 ans de conquête technologique : à la recherche de la précision ultime.

Les dates à retenir :

22 octobre 1707 : désastre des îles Sorlingues (Scilly Islands). Quatre navires de la flotte anglaise de Méditerranée sombrent.

Juillet 1714 : le parlement anglais promeut le Longitude Act. L’acte promet une récompense à qui mettrait au point une montre de marine fiable, et donne naissance au Board of Longitudes.

1735. John Harrison, ébéniste et horloger autodidacte, met au point son premier chronomètre de marine, le H1. Celui-ci ne peut encore embarquer.

4 décembre 1753. À Paris, Ferdinand Berthoud reçoit le titre de Maître Horloger à 26 ans seulement.

1759 : Harrison met au point le H4. Cette fois, ce chronomètre est apte à naviguer en mer.

1761 : Berthoud achève la fabrication de sa première montre de marine, la N°1.

1763 : Berthoud est envoyé à Londres pour examiner le H4. Harrison refuse de la lui montrer.

1765. Après deux voyages aller-retour entre l’Angleterre et la Jamaïque, puis La Barbade, le H4 prouve sa fiabilité en mer.

1768. Voyage de la corvette l’Isis entre Rochefort et Saint-Domingue et retour pour essayer en mer les montres Berthoud N°6 et N°8. Succès complet.

1er avril 1770 : Ferdinand Berthoud est nommé horloger mécanicien du roi.

1er mai 1772. Départ de Lorient de la première expédition de Kerguelen. Il embarque la Berthoud N°6. Ce qui en fait la première expédition en conditions réelles qui utilise une montre de marine.

11 juillet 1772 : James Cook part pour son second voyage. Il embarque l’horloge K1, copie du H4.

8 avril 1802 : Nicolas Baudin et Matthew Flinders se rencontrent à Encounter Bay, au sud de l’Australie. Chaque expédition porte quatre montres de marine. Toutes les côtes habitées ont été explorées et cartographiées.

1955 : première horloge atomique.

1973 : conception du système GPS par le Pentagone.

1978 : lancement du premier satellite GPS. Le système complet est opérationnel en 1995.

2022 (prévisionnel) : lancement de Pharao (première horloge atomique à atomes froids en orbite) par le CNES, destiné à s’arrimer à l’ISS.

VENDREDI 13 AOUT À 18H00

Votre conférenciER

Ancien chasseur de tête international, Patrick Llewellyn travaille depuis 2015 en France et en Australie à faire revivre les grandes aventures maritimes des XVIIIème et XIXème siècles : explorations scientifiques, corsaires, rivalités entre les nations, c’est une fabuleuse aventure humaine et technique qu’il s’attache à faire revivre pour le bonheur du plus grand public. Il est l’auteur de la trilogie Terre Australe qui raconte l’histoire de l’expédition maritime scientifique envoyée par Bonaparte en Australie en 1800.

À lire pour aller plus loin :

La longitude en mer à l’heure de Louis Berthoud et Henri Motel, Jean-Claude Sabrier, Antiquorum 1993.

Marine chronometers at Greenwich, Jonathan Betts, OUP Oxford, 2018.

The marine chronometers : its history and development, Rupert T. Gould, Antique Collector’s Club 2013.

John Harrison and the quest for longitude, Jonathan Betts, National Maritime Museum 2020.