Marathon - Chroniques - La bibliothèque de Storia Mundi-1

 Marathon, une histoire de fenouil et de confusion

Tout le monde sait qu’un marathon est une course à pied de 42,195 kilomètres dont on doit le nom au linguiste français Michel Bréal. Ce dernier puisa son inspiration dans un célèbre épisode de l’histoire des guerres médiques, lesquelles opposèrent Grecs et Perses pendant une grande partie du Vème siècle av. J.-C. : l’épisode de la bataille de Marathon.

Au cours de la première guerre médique, les Athéniens secondés par les seuls Platéens*, écrasèrent dans la plaine de Marathon un solide corps expéditionnaire perse**. Vainqueurs, les Athéniens dépêchèrent aussitôt un courrier à pied – un hémérodrome en VO – annoncer la nouvelle à leurs concitoyens qui attendaient anxieusement des nouvelles du front. Selon Plutarque, c’est un certain Euclès qui courut d’une traite la distance séparant le champ de bataille de la cité, soit 42 kilomètres (et des brouettes). D’où le nom et la distance de nos modernes marathons.

Ajoutons pour la précision que ledit Euclès eut à peine la force de s’écrier « nous avons vaincu » avant de pousser son dernier soupir. Une scène belle comme un film de Clint Eastwood.

Hérodote, lui, nous parle d’un autre hémérodrome, dénommé Phidippidès ou Philippidès, qui aurait été expédié à Sparte pour réclamer des secours avant que la bataille ne commence. 250 km séparaient les deux cités. Phidippidès aurait parcouru cette distance impressionnante – à pied toujours - en 36 heures seulement. Sans même trépasser à l’arrivée. Cela dit, les efforts de Philippidès furent vains : les Spartiates avaient d’autres chats à fouetter. Conséquemment, ils continuèrent à vaquer à leurs mesquines occupations domestiques (honorer les dieux et punir les hilotes) cependant que les Athéniens (et les Platéens) se couvraient de gloire tous seuls.

La confusion provient d’un auteur satirique du IIème après J.-C., Lucien de Samosate, qui mélangea les deux histoires. Chez Lucien, c’est Philippidès qui courut annoncer la victoire à Athènes (et qui meurt dans la foulée). Curieusement, c’est cette dernière version qui s’est imposée et c’est le nom de Philippidès qui reste associé aujourd’hui encore à celui de la bataille et de la course.

Et le fenouil dans tout ça me direz-vous ?

La réponse est toute simple. Fenouil en grec se dit… marathon (μάραθον) ou marathos (μάραθος). Sans doute cette plante devait-elle pousser en telle quantité dans la plaine de Marathon que le lieu en prit le nom.

*Les Platéens sont les citoyens de la petite cité de Platée, située à la frontière de l’Attique et de la Béotie, pas les hurluberlus qui croient que la terre est plate. Ces derniers sont des platistes.

**Lors de la première guerre médique, les Perses bénéficièrent des conseils de l’ancien tyran d’Athènes, Hippias. Ce qui nous rappelle que la frontière entre eux et nous est toujours beaucoup plus poreuse qu’on ne le croit souvent. De nombreux héros Grecs des guerres médiques passèrent du reste du côté obscur de la force. Thémistocle, le vainqueur de Salamine, en est un autre bon exemple.


Ci-dessus : détail d’une amphore datée très exactement des années 333-332 av. J.-C. qui montre des coureurs grecs. La pièce est aujourd’hui conservée au British Museum.