La Conférence de Berlin (1884-1885) : quel héritage pour l’Afrique ?..

LA CONFÉRENCE DE BERLIN (1884-1885) : QUEL HÉRITAGE POUR L'AFRIQUE

Organisée par le chancelier allemand Bismarck sur une initiative franco-allemande, la Conférence de Berlin se tient du 15 novembre 1884 au 26 février 1885. Elle précise pour l’Afrique les conditions de la colonisation entre les différentes puissances européennes. L’ère coloniale connaît alors sa plus forte expansion jusqu’en 1914.

Reléguée dans les mémoires par le Congrès de Berlin (13 juin-13 juillet 1878) sur les Balkans, qui l’a précédée, la Conférence de Berlin exerce pourtant une influence durable sur le cours des relations contemporaines entre l’Europe et l’Afrique. La réalité du « partage de l’Afrique » alors réalisé, lieu commun tenace, est cependant aujourd’hui discutée.

L’Acte final de la Conférence définit une sorte de « code de bonne conduite » pour les conquêtes coloniales à venir, en découpant l’Afrique en « sphères d’influence », une notion juridique nouvelle forgée à l’occasion de la Conférence. Ce n’est pas la seule innovation introduite dans le droit international par la Conférence de Berlin, qui entérine le principe clé des « occupations effectives », préalable à toute revendication territoriale par une puissance. Cette conférence majeure pour les relations internationales, dont l’importance est aujourd’hui nettement réévaluée à la hausse, pose de nombreuses questions.

Initiée conjointement par la France et par l’Allemagne au sein du « concert européen » (1814-1914), s’agit-il d’une « conférence » à proprement parler - plutôt que d’un « congrès », voire même d’un quasi-traité entre États européens ?

Comment qualifier ses conséquences ? « Partage », « découpage », « dépècement », « curée » de l’Afrique, « ruée sur l’Afrique » (« scramble for Africa »), « course au clocher » ?

Pour l’Afrique, les frontières alors arrêtées sont-elles exogènes, arbitraires, artificielles ? Peut-on y voir une opposition entre « partage de papier » et « partage de terrain » ? La frontière même en Afrique est-elle une « invention » européenne ?

La Conférence est-elle un succès pour la Belgique et donc un échec pour la France ? Signe-t-elle la naissance de l’impérialisme européen et du « colonialisme républicain » ?

Les dates à retenir :

1874 : Illoy Ier, proclamé makoko du royaume Tio.

1875-1878 : première mission de Brazza au Gabon.

1878 : Congrès de Berlin sur les Balkans.

1879-1882 : deuxième mission de Brazza ; expédition de Stanley pour le compte de Léopold II, roi des Belges.

1880 : fondation de Brazzaville.

1882 : traité avec Illoy Ier, ratifié par la France.

1884-1885 : Conférence de Berlin sur l’Afrique.

1891 : création de la colonie du Congo français ; Brazza, commissaire général pour la France.

1892 : mort d’Illoy Ier.

1910 : l’Afrique équatoriale française (AEF) réunit le Gabon, le Moyen-Congo, l’Oubangui-Chari et le Tchad.

Votre conférencier

Amaury Lorin, docteur en histoire de l’Institut d’études politiques de Paris, a vécu cinq ans en Asie (Chine, Vietnam, Birmanie). Il a notamment codirigé Nouvelle histoire des colonisations européennes (XIXe-XXe siècles) : sociétés, cultures, politiques, Paris, PUF, coll. « Le Nœud gordien », 2013 ; et L’Europe coloniale et le grand tournant de la Conférence de Berlin (1884-1885), Paris, Le Manuscrit, coll. « Carrefours d’empires », 2013. Il contribue depuis 2010 à Questions internationales (La Documentation française).

À lire pour aller plus loin :

Henri Brunschwig, Le Partage de l'Afrique noire, Paris, Flammarion, 2009 (1971)

Amaury Lorin et Christine de Gemeaux (dir.), L’Europe coloniale et le grand tournant de la Conférence de Berlin (1884-1885), Paris, Le Manuscrit, coll. « Carrefours d’empires », 2013.

Amaury Lorin et Christelle Taraud (dir.), Nouvelle histoire des colonisations européennes (XIXe-XXe siècles) : sociétés, cultures, politiques, Paris, PUF, coll. « Le Nœud gordien », 2013.

Henry Wesseling, Le Partage de l’Afrique (1880-1914), Paris, Gallimard, 2002 (1996).

« 1885, Conférence de Berlin : le partage de l’Afrique », L’Histoire, n° 477, novembre 2020.

À REGARDER pour aller plus loin :

Joël Calmettes, Berlin 1885 : la ruée sur l’Afrique, Arte, 2011.