Ils se nomment Clodomir, Sigebert ou Chilpéric... Mais ces noms compliqués n’encombrent pas trop notre mémoire collective. Tout au plus retient-on Clovis, pour une sombre histoire de vase cassé à Soissons, ou Dagobert, pour des problèmes vestimentaires qu’il n’a sans doute jamais éprouvés. Pour le reste, les Mérovingiens font pâle figure : barbares ou fainéants, ils ne semblent guère mériter leur place dans les livres d’histoire. Il est vrai que la première dynastie royale se trouve écartelée entre Antiquité et Moyen Âge, ce qui dissimule son ampleur extraordinaire : plus de trois siècles de longévité, soit davantage que toutes les autres familles royales à l’exception des Capétiens, et surtout près d’une centaine de rois, lesquels règnent souvent en même temps. Les premiers Mérovingiens apparaissent dans le second tiers du Ve siècle, avec des personnages mal documentés comme Clodion ou Mérovée. Jusqu’aux années 500, les Francs restent d’ailleurs divisés entre une demi-douzaine de groupes dirigés par des roitelets vaguement apparentés. Clovis change la donne. Il entreprend la conquête de l’actuelle Picardie, puis annexe le Bassin Parisien. Au fil des années, ses troupes multiplient les conquêtes sur la rive droite du Rhin et se risquent jusqu’à la vallée du Rhône. En 507, Clovis parvient surtout à vaincre les Wisigoths, dont il occupe presque toutes les possessions entre la Loire et les Pyrénées. Ses successeurs poursuivent une politique faite de violence, d’opportunisme et de respect des traditions romaines. En jouant tantôt de la guerre, tantôt de la diplomatie, ils repoussent les frontières de leur royaume. Dans les années 550, le territoire franc s’étend de la Saxe aux Pyrénées et de la Manche à la moyenne vallée du Danube. Clovis fut baptisé dans la foi catholique et les successeurs respectent ce choix. Dès le début du VIe siècle, ils soutiennent les clercs, réunissent les conciles, fondent hospices et monastères. Ils n’hésitent pas à légiférer pour encourager la christianisation. En 595 par exemple, Childebert II impose à tous ses sujets le principe du dimanche chômé, sous peine d’amende pour le contrevenant ! Dans tous les cas, le roi mérovingien se présente comme le « ministre de Dieu » dont la mission est d’assurer le Salut de tous ses sujets.

Cette conférence propose de parcourir l’histoire d’une dynastie méconnue, dont la mémoire fut noircie par les Carolingiens qui tentèrent de les présenter comme des usurpateurs.

Les dates à retenir :

vers 500-508 - Baptême de Clovis
507 - Victoire des Francs sur les Wisigoths à la bataille de Vouillé
511 - Mort de Clovis, premier « grand partage »
561 - Mort de Clotaire Ier. Second « grand partage »
573 - Début de l’épiscopat de Grégoire de Tours
vers 592 - Arrivée de Colomban et des moines irlandais en Gaule
613 - Réunification du royaume par Clotaire II
639 - Mort du roi Dagobert
687 - Bataille de Tertry, Pépin le Bref maître de l’Austrasie et de la Neustrie
716 - Charles Martel maire du Palais
751 - Déposition du dernier roi mérovingien par Pépin le Bref

Votre conférenciER

Bruno Dumézil est professeur en Histoire médiévale à Sorbonne Université ; professeur à l’Ecole Polytechnique.