Rome est-elle tombée face aux barbares ?

Rome est-elle tombée face aux barbares ? Comprendre la disparition de
l’Empire d’Occident

En 476, le dernier empereur romain d’Occident, Romulus Augustule, est déposé par un général d’origine barbare, Odoacre. Cette date a longtemps été retenue comme celle de la fin de l’Antiquité et du début d’une époque nouvelle, le Moyen Âge.  En réalité, la déposition de Romulus Augustule n’est qu’un événement politique, en lui-même peu signifiant aux yeux des contemporains qui y attachèrent une importance très relative.

L’Empire romain continuait en effet d’exister en Orient — les historiens lui donnent dès lors le nom d’Empire byzantin — et Odoacre envoya à Constantinople les insignes de l’Empire d’Occident. Le geste d’Odoacre ne constituait d’ailleurs pas une rupture : officiellement, en 476, le monde romain était réunifié, et non détruit. Même s’il était de plus en plus fictif, il continua d’exister jusqu’à la prise de Constantinople par les Turcs en 1453.

La longue vie de l’Empire romain ne signifie pas pour autant que le monde occidental soit demeuré invariant au cours du temps. À partir du IIIe siècle de notre ère, la civilisation romaine connut une profonde mutation, due tant à des facteurs internes (crise économique accompagnée d’une déprise démographique dans certaines régions, guerres civiles à répétition, mutations religieuses) qu’à des éléments extérieurs (accroissement de la pression militaire sur ses frontières, perte de provinces frontalières). Même la composition de la population changea légèrement, avec l’immigration de populations barbares plus ou moins assimilées.

Dès le Ve siècle, la dissolution politique de l’Empire d’Occident achève de modifier le cadre de vie. Les espaces se cloisonnent et les échanges en pâtissent. Le cadre traditionnel de la cité romaine s’efface, sans jamais disparaître toutefois. Une forme d’État demeure, mais la domination politique et militaire revient à des individus dits « barbares » et à leur entourage. Tout cela perturbe les hiérarchies sociales anciennes et oblige à les redéfinir. Il en va de même des identités ethniques.

La « chute de Rome » constitue une mutation aux multiples facettes que cette conférence propose d’évoquer. 


LES DATES À RETENIR :


238 - Premiers raids des Goths sur la mer Noire
276 - Incursions barbares en Grèce et en Gaule
284-305 - Règne de Dioclétien et mise en place de la Tétrarchie
325 - Concile de Nicée
378 - Bataille d’Andrinople
395 - Partage de l’Empire romain entre les fils de Théodose
407 - Entrée en Gaule des Vandales, des Suèves et des Alains
410 - Sac de Rome par Alaric, roi des Goths
418 - Traité installant les Goths en Aquitaine
451 - Attila en Gaule. Bataille des champs Catalauniques
476 - Disparition de l’Empire romain d’Occident


Votre conférenciER

Bruno Dumézil est professeur en Histoire médiévale à Sorbonne Université ; professeur à l’Ecole Polytechnique.

À lire pour aller plus loin :


SUR LA CONFÉRENCE

Christine Delaplace, La Fin de l’Empire romain d’Occident. Rome et les Wisigoths de 382 à 531

Peter Heather, Rome et les barbares

Hervé Inglebert, Atlas de Rome et des barbares (IIIe-VIe siècle). La fin de l’Empire en Occident

Bryan Ward-Perkins, La Chute de Rome



LES OUVRAGES DE BRUNO DUMÉZIL

Les racines chrétiennes de l’Europe, Conversion et liberté dans les royaumes barbares V-VIIIe siècle,

La société occidentale au Moyen Âge,

La reine Brunehaut,

Le Bréviaire d’Alaric, aux origines du Code Civil, dir Michel Rouche et Bruno Dumézil,

Les barbares expliqués à mon fils,

Le problème de la christianisation du monde antique, dir. Hervé Inglebert, Sylvain Destephen et Bruno Dumézil, Picard, Paris, 2010.

Les royaumes barbares d’Occident,

Servir l’État barbare en Gaule franque, Paris,

Des Gaulois aux Carolingiens,

Les barbares (dir.),

Les temps barbares, de la chute de Rome à Pépin le Bref, en coll. avec Hugues Micol, « Histoire dessinée de la France » dir. Sylvain Venayre,

Le baptême de Clovis.