Brennus - Chroniques - La bibliothèque de Storia Mundi

BRENNUS

LA TERREUR DES ROMAINS

Les fans du ballon ovale connaissent bien le nom de ce bouclier qui fait, chaque saison, l’objet d’une compétition acharnée entre les clubs du Top 14 (l’élite du rugby tricolore).

Pourtant, bien avant d’être un trophée de rugby – qui porte en réalité le nom de son sculpteur – Brennus (ou Brennos) fut le nom d’un chef de guerre Gaulois. Et quel chef, puisque ce dernier réussit à mener ses troupes jusqu’à Rome, cité qu’il mit à sac au début du IVème siècle av. J.-C !

De cet épisode tragique, les Romains gardèrent une rancœur aussi épidermique qu’inextinguible envers les Celtes. On connait la suite, des siècles plus tard : Vercingétorix, Alésia et la Guerre des Gaules.

L’histoire de Brennus - héros pour les Sénons, fléau pour les Latins - reste toutefois mal connue puisque les différentes sources romaines qui relatent son histoire se contredisent et ont l’inexactitude de l’histoire écrite par des vaincus : minimisation des pertes, glorification des actes de résistance et diabolisation des envahisseurs.

À vrai dire, on ne sait même pas si Brennus était vraiment le nom du chef des Gaulois : c’est dire le peu d’informations à notre disposition !

La langue gauloise connait en effet le substantif brenn qui signifie… chef de guerre. Imaginez donc la scène : les guerriers gaulois, gonflés d’orgueil par leur éclatante victoire, la moustache encore empanachée d’adrénaline, déclarent aux vaincus venus pour négocier : « OK, on vous amène notre chef (brenn) », et les Romains, impressionnés, forcément impressionnés, de répondre au colosse victorieux qui s’avance vers eux « Bonjour Monsieur Chef ! ».

L’image prête à sourire, mais elle n’est pas sans parallèle dans l’histoire romaine. En veut-on un exemple ?

Lorsque les légions de Crassus affrontèrent les Parthes au cours de la désastreuse bataille de Carrhes, ces derniers étaient commandés par un redoutable général que les sources latines appellent Suréna. Or ce que, là encore, les Romains prirent pour un nom propre signifie en persan ancien… général. Derechef, Monsieur Chef si l’on veut… On peut donc ajouter le général Général à la liste des tautologies romaines.

Une autre hypothèse, moins grotesque, serait celle de l’antonomase, autrement dit le phénomène par lequel un nom propre devient un nom commun. Brennus aurait été une telle figure d’autorité dans la mémoire gauloise qu’après sa mort, son nom serait devenu un titre. Cette hypothèse nous rappelle d’ailleurs l’histoire d’un autre grand manitou, romain celui-là, le divin Jules. Le cognomen de ce dernier – César – devint, après le trépas du célèbre général et dictateur, un gentilice (nom de famille) portés par tous les empereurs romains puis un titre désignant l’héritier du trône.

Cette vue d’artiste quelque peu fantasmagorique du sac de Rome par le peintre Paul Jamin est intitulée Le Brenn et sa part du butin. L’œuvre, datant de 1893, est aujourd’hui exposée au Musée des beaux-arts de La Rochelle.