A lire : Russie, révolution et guerre civile, 1917-1921 par Antony Beevor
Antony Beevor - ancien officier de l'armée britannique - est un spécialiste reconnu de l'histoire militaire de la seconde guerre mondiale. Avec cet ouvrage, publié au cours de l'automne dernier par Calmann-Lévy, il propose une vaste synthèse des affrontements protéiformes qui débutent dès avant la révolution d'octobre pour s'achever en 1921 par la victoire sans appel des Bolcheviks.
En un peu moins de quatre ans, les territoires de l'ancien Empire russe ont vu s'entredéchirer dans une série de guerres féroces Rouges et Blancs, c'est à dire Bolcheviks et monarchistes, mais également anarchistes, nationalistes (Finlandais, Lettons, Lituaniens, Ukrainiens, Estoniens, Polonais) et non-alignés (les Verts)… sans oublier bien sûr le rôle des puissances étrangères (Austro-Allemands, Britanniques, Français, Américains, Japonais…).
A lire la courte liste (non exhaustive !) des belligérants, on comprend la complexité de ce conflit composé en réalité d’une multitude de guerres imbriquées les unes dans les autres. Et ce n’est pas le moindre mérite de ce livre que d’en dégager les grandes articulations.
Au fil des pages, le lecteur découvre par ailleurs l’effrayante galerie de portraits des grands acteurs de la révolution comme de la contre-révolution, engagés dans une lutte sans merci menée avec une brutalité inouïe dans le chaos d’un monde qui s’effondre.
A la lecture du livre, on repense à ce discours dans lequel Lluís Companys, président de la Généralité de Catalogne pendant la guerre d’Espagne, a déclaré en substance dans une tentative désespérée pour galvaniser ses troupes : accrochez-vous les amis, c’est moins le gagnant qui gagne que le perdant qui perd.
Et c’est bien la conclusion qu’avance l’auteur : malgré des réels atouts, les Blancs n’ont jamais été capables ni de s’entendre, ni de coordonner efficacement l’action de leurs différentes armées. Sans même parler de leur incapacité à mettre en œuvre une politique à même de leur gagner le concours des masses rurales. Face à eux, des leaders bolcheviks déterminés à remporter la victoire quoi qu’il en coûte. En filigrane, se dessine le destin tragique de la grande victime de la guerre : le peuple russe.
Servi par une plume alerte, le livre se lit d’une traite. On regrettera cela dit l’absence de chapitres thématiques qui auraient permis d’approfondir certains des aspects abordés rapidement.