Le Voleur, le Moyen-âge et la guerre chirurgicale
Le Voleur est un film de Louis Malle, sans doute l’un de ses meilleurs, sorti en 1967 dans lequel Jean-Paul Belmondo incarne un monte-en-l’air plus nihiliste qu’anarchiste dénommé Georges Randal. L’action se déroule au début des années 1890.
Le film s’ouvre sur une scène où ce dernier cambriole sans chichis ni romantisme aucun une riche villa. S’adressant au public d’une voix froide, distante, Belmondo-Randal déclare alors « Je fais un sale métier, mais j'ai une excuse, je le fais salement ». Sans romantisme, on vous dit.
C’est également sans romantisme que l’enluminure que vous voyez-là nous montre la guerre pour ce qu’elle est : un bain de sang qui peut être parfois nécessaire mais qui est toujours dégueulasse. Il est vrai que cette enluminure date du mitan du XIIIème siècle, une époque punk où les intellectuels (pardon pour les anachronismes à répétition) n’hésitaient pas à critiquer l’ordre établi et les non-dits dont ce dernier s’entoure. Il suffit de relire la poésie satyrique des Goliards pour s’en convaincre. Bref, en 1245, on appelle un chat un chat et qui veut représenter une bataille commence par tremper son pinceau dans un pot de peinture rouge.
De nos jours, s’est imposée l’idée que la guerre peut être chirurgicale, presque sans morts donc, les méchants mis à part comme dirait Georges Bush junior, idée qui est non seulement complètement fausse (rappelons-nous de l’Irak et de l’Afghanistan par exemple) mais également fort dangereuse. Cette idée masque en effet la seule vraie question qui devrait être débattue avant d’ouvrir les portes du temple de Janus : cette guerre – qui sera forcément sale, moche et massacrante - est-elle juste ou pas. Justifiée à tout le moins.
Ci-dessus : le détail que vous voyez-là provient d'une enluminure illustrant la Bible de Maciejowski, laquelle date de 1245 (environ) et se trouve aujourd’hui à la Morgan Library, à New York, aux Etats-Unis. N’hésitez pas à zoomer sur la furieuse mêlée au centre de la composition. Les détails sont explicites… et interdits aux moins de 12 ans seulement selon les recommandations de la Commission de classification des œuvres cinématographiques.