La chute de la monarchie et le sacrifice de la Garde suisse du 10 août

La chute de la monarchie et le sacrifice de la Garde suisse du 10 août 1792

Les relations qui unissent la France et la Suisse ont quelque chose de très particulier sur la longue durée puisque l’alliance perpétuelle entre les deux pays a été signée il y a de cela 500 ans en 1521.  Chacune des deux parties prenantes doit tant à l’autre que ça en est finalement dérangeant pour la bonne gestion de l’histoire nationale des deux pays. Occulter si possible, exagérer si nécessaire, semble avoir été une constante dans le traitement idéologique de notre histoire commune. Facteur aggravant en ce qui concerne le 10 août 1792, les Français ont eux-mêmes trouvé intérêt à évacuer la participation suisse à l’événement au point d’en faire un sujet à éviter soigneusement. Il en a été de même d’ailleurs de même pour la prise de la Bastille le 14 juillet 1789.

Le 10 août 1792, l’un des plus spectaculaires faits d’armes de l’histoire suisse met brutalement fin à treize siècles de monarchie en France. Le régiment des Gardes-Suisses assume la mission impossible de défendre les Tuileries, lors d’une sorte de baroud d'honneur de la royauté. Ce sera le plus grand tournant de la Révolution française. Rares sont les Français qui connaissent le rôle exact joué par la Suisse et les Suisses dans cette et leur histoire. Et pour cause : il ne ressort rien de bien valorisant et flatteur pour les protagonistes français de cette journée à nulle autre pareil. Nul ne sort indemne de cette terrible histoire qui voit les révolutionnaires attirer les Suisses dans un véritable piège machiavélique pour en finir une fois pour toutes avec la reine Marie-Antoinette -si présente en la circonstance- et un Louis XVI qui s’est caché derrière ses habits rouges tel un torero figé derrière sa muleta, attisant l’animosité de ses ennemis. On devine aisément la suite et l’issue de cet affrontement !

Que cache cette journée où le royaume des Français s’effondra ? Quel rôle précis joua ou fit-on jouer aux Suisses ? Quelles ont été les conséquences de cette journée à court et à long terme : massacre de septembre, suspension de l’alliance franco-suisse, licenciement général des troupes suisses au service de la France, rôle méconnu des rescapés lors de la guerre de Vendée, commencement de la fin pour l’antique Confédération.

Le 10 août 1792 marquera une rupture profonde dont les conséquences se font encore sentir de nos jours. Plus rien aussi ne sera comme avant dans les relations franco-suisses. La chapelle expiatoire à Paris et le Lion de Lucerne témoignent de cette journée tragique.

Les dates à retenir :

1481 : Louis XI enrôle des Suisses comme instructeurs pour l'armée française et des gardes chargés de sa protection personnelle.

1515 :  la France signe avec les Confédérés un traité de paix perpétuelle qui sera respecté jusqu'à la chute de la monarchie française, en 1792. Les Suisses mettent leurs mercenaires au service du roi de France

1521 : un traité d'alliance entre la France et les Cantons engage les Suisses à fournir entre six et seize mille soldats au roi français en échange de la protection du puissant voisin.

1567 : les Suisses protègent le roi Charles IX d’une tentative d’enlèvement de la part de Condé.

1616 : le roi Louis XIII donne à un régiment d'infanterie suisse le nom de Gardes suisses.

1792 : défense du palais des Tuileries par le régiment des Gardes-Suisses.

Votre conférenciER

Docteur ès lettres de la Sorbonne, spécialiste des relations franco-suisses, chargé de cours émérite à l’Université de Fribourg/CH, titulaire des Palmes académiques, chevaliers des Arts et des Lettres et de l’Ordre national du Mérite, Citoyen d’honneur de la ville impériale de Rueil-Malmaison, Alain-Jacques Czouz-Tornare, né en 1957, a participé en 2003 au film d’Anne Cunéo : « Napoléon et la Suisse : la Médiation, naissance d’une nation ». Pour France 2, il a tourné pour le magazine historique « Secrets d’histoire » : « Danton : aux armes citoyens ! » Auteur de nombreuses expositions tant en France qu’en Suisse, il a contribué à vulgariser l’histoire pour plusieurs médias écrits comme L’Histoire, Le Temps, L’Hebdo, Passé Simple, ou audiovisuels comme la RSR Espace 2, France Culture ou Radio Fribourg. Les lecteurs et auditeurs apprécient les présentations décalées et provocatrices de cet historien atypique et volontiers franc-tireur.

À lire pour aller plus loin :

Alain- Jacques Tornare, Vaudois et Confédérés au service de France 1789-1798, Cabédita, 1998.

Alain- Jacques Tornare, La prise des Tuileries et le sacrifice de la Garde suisse, Paris Editions SPM 2017.

Alain- Jacques Tornare, Le crépuscule de la Monarchie. Le sacrifice de la Garde suisse. 10 août 1792, Bière, Cabédita 2016.

Alain- Jacques Tornare, Le 10 août 1792 / Les Tuileries. L’été tragique des relations franco-suisses, série « Grandes dates » dans la Collection Le Savoir suisse, 2012, no 84.

Alain- Jacques Tornare, La Révolution française pour les Nuls, Paris, Editions First, 2009.

À REGARDER pour aller plus loin :

La Marseillaise de Jean Renoir (1938).

Les années Lumière de Robert Enrico (1989).

Les Suisses de Pierre-Aristide Bréal (pièce de théâtre enregistré en 1969).


Parmi les AUTRES ouvrages du Pr TORNARE :

Les Vaudois de Napoléon, des Pyramides à Waterloo 1798-1815. Cabédita 2003.

Louis d’Affry 1743-1810, premier landamman de la Suisse. La Confédération suisse à l’heure napoléonienne, Genève Editions Slatkine, 2003.

L’Histoire des Fribourgeois et de la Suisse, Cabédita, Bière, 2012.

Tint’interdit - Pastiches et parodies ; éd. de Penthes & éd. Cabédita ; Pregny-Chambésy ; 2014.

Saint-Exupéry en Suisse, Cabédita, 2017.Madame Willermaulaz. La Suissesse de Beaumarchais, infolio Presto, Gollion, 2020.